Pascual Gimeno Rufino avait combattu pendant la guerre civile comme officier dans l’armée républicaine (lieutenant ou capitaine). Passé en France lors de la Retirada de février 1939 il fut interné à Argelès puis, à la fin de l’année, fut transféré dans un Groupe de travailleurs étrangers à la poudrerie d’Istres (Bouches-du-Rhône) où il prit immédiatement contact avec des communistes français et commença à organiser ses compatriotes. Le 6 mai 1941 il épouse Virginie Ardisson qui sera également une grande résistante. Pendant l’Occupation et avec la complicité d’un ingénieur et de sa belle famille il sortira beaucoup d’explosifs de la poudrerie. Après avoir constitué ses réseaux, en relation avec les FTP-MOI, il devint sous le nom de Royo le responsable des guérilleros du département et assura réception et répartition des armes et explosifs entre les groupes ainsi que l’instruction militaire des maquisards.
Le 17 juin 1944 Royo quittait les Bouches-du-Rhône pour s’intégrer dans l’Ariège à la 3e Brigade de la 26e Division de guérilléros commandée par Manuel Castro. Il fut chargé de la direction de cette Brigade qui eut un rôle déterminant dans la Libération du département et de Foix en août 1944 et à laquelle participa notamment le commandant Bigeard Aube qui avait été parachuté le 8 août sur ce maquis espagnol avec un commando anglo-français, rôle dont il témoignera dans son livre Parcelle de gloire (1975) où il qualifiera à tort Royo d’être un militant anarchiste.
Après la Libération de l’Ariège, Royo s’attacha au renforcement de la 3e Brigade afin de participer aux opérations d’invasion de l’Espagne dans le cadre de Reconquista de España. Les premiers détachements de la 3e Brigade, destinés au secteur de Lérida, s’infiltrèrent à partir du 18 septembre. Royo les rejoignit début octobre, mais beaucoup de ses hommes seront tués ou fait prisonniers par des forces franquistes en nombre et les rescapés devront repasser en France. Seul un petit groupe issu de cette Brigade parviendra à s’intégrer à la guérilla de Juan Delicado avec lequel ces hommes, dont Victoriano Anastasio Serrano Capitan, constitueront le noyau de la future Agrupacion guerrilera de Levante (AGL).
Pascual Gimeno Royo fut arrêté avec Francisco Navarro Rodriguez qui lui servait de guide avant la fin de l’année 1944 à Artesa del Segre (Lérida) par la Guardia Civil. Trouvé porteur d’une somme d’argent, il répondit à la police que l’argent provenait de son travail en France pendant 5 ans et qu’il revenait en Espagne pour aider financièrement sa famille. Les deux hommes déclarèrent également s’être enfui de la guérilla et avoir voulu aller à Valence pour y trouver du travail. Il fut incarcéré à la prison de Sant Elies à Barcelone, puis les faits pour lesquels il avait été arrêté étant « trop mineurs pour justifier la poursuite d’une procédure » il bénéficia d’un non-lieu provisoire et fut remis en liberté surveillée (cf. procès verbal du Tribunal de Valence, G.2314984/59). A l’été 1945, il partait alors à Valence pour aller chez sa sœur et s’intégrer à la lutte clandestine. Après avoir été incorporé à l’organisation par Jesus Izacaray Cebriano Marcos, secrétaire du Comité régional du Parti à Valence, et suite à un ordre venu de France et dans le cadre d’une campagne d’épuration lancée par Santiago Carillo et le Bureau politique du Parti de retour de Moscou, Pascual Gimeno Royo était assassiné. Le 24 juillet 1945 son corps était retrouvé dans un champ de maïs situé près d’un sentier près de la gare de Valence, son visage avait été écrasé à coups de pierres afin de le rendre méconnaissable. Il sera identifié le 26 juillet par son beau frère grâce à sa montre, son alliance et ses vêtements.
Plusieurs autres cadres du Parti, issus de la Résistance en France, furent ainsi liquidés : « La lutte clandestine en France avait produit une magnifique pléiade de cadres dirigeants du Parti, qui peu conformistes avec les normes d’obéissance aveugle qye le Bureau politique exigeait, constituaient un péril pour sa propre sanctification… .le Bureau politique s’imposa la nécessité de prendre les rênes de l’appareil en mains, ce en, quoi tous les cadres surgis de la lutte étaient une gêne. La première opération consista à tous les éliminer « (Témoignage de Luis Bermejo, ancien chef de Division, dans le livre de D. Arasa « La invasion de los maquis »).
Le nom de Pascual Gimeno Royo fut à partir de ce moment et jusqu’à aujourd’hui (2010), gommé systématiquement des discours et commémorations, de l’historiographie communiste concernant son rôle tant dans la Résistance en France qu’en Espagne par un parti qui fit courir des rumeurs sur sa soi disant « traîtrise »
En novembre 2010, Ange Alvarez et Ivan Delicado, auteurs d’une enquête détaillée sur Pascual Gimeno, émirent le souhait que le Parti communiste espagnol crée une commission pour étudier le cas de Royo - que ce même parti a laissé inscrire le nom sur la liste des victimes du franquisme – et d’autres afin de les réhabiliter dans une démarche de devoir de mémoire.