Militant confédéral en Aragon, Victorio Castán Guillen Reyes, fils de Maximiliano et de Victoria Guillen, était au début de la guerre civile milicien dans la Colonne Carod-Ferrer dans la zone de Bujaraloz. Puis il était chargé d’encadre un groupe de mineurs d’Utrillas qui constitueront le Bataillon Castan qui reprendra plusieurs villages de la zone aux insurgés. Après la militarisation, Victorio Castán commandait la 118e Brigade Mixte, formée à partir du noyau du Bataillon Castan, dont le commissaire était Saturnino Carod Lerín. Cette Brigade, considérée comme une unité de choc par la qualité de son organisation et sa capacité offensive, participait en juin 1937 à partir de Fuendetodos à une attaque sur Huesca et à la prise de Belchite et du Sillero avant d’intervenir dans la prise de Teruel. Le 6 octobre la brigade recevait l’ordre de se retirer de Belchite pour Caspe et Victorio Castan était nommé responsable dela 25e Division et du XVII Corps d’armée avec le grade de lieutenant colonel. En avril 1938, avec ce même grade, il était nommé responsable de la 66e Division aux cotés de Francisco Bravo Quesada.
Victorio Castan avait épousé en décembre 1936 à Azuara (Aragon) Pilar Huertos.
Fait prisonnier à la fin de la guerre, il a été interné au camp d’Albatera dont il s’évadait vers mai 1939 avec Saturnino Carod Lerin et Sebastián Vicente Esteban. Les trois hommes, lors du regroupement le soir des prisonniers dans les baraques, étaient parvenus à se cacher dans un trou. Après un bref passage par Saragosse, il passait en France avec sa compagne et leur fils, grace au réseau monté par Francisco Ponzan. Il avait été arrêté à Perpignan (?) et condamné le 6 setembre à 10 mois de prison et 200 francs d’amende pour infraction à un arrêté d’expulsion datant e mai 1938. Il avait été ensuite transféré le 6 octobre à la Maison d’arrêt de Montpellier. Le 13 octobre 1939. un arrêté d’expulsion du Préfet des Pyrénées-Orientales lui était notifié à la prison de Montpelleier. Victorio Castan était interné vers mars 1940 au camp du Vernet d’où il était remis en liberté le 15 mai 1940 pour être remis aux services de gendarmerie de Foix et dès septembre 1940 s’intégrait aux services de renseignement de la Défense nationale.
Il collaborait au groupe de passage et réseau de Francisco Ponzán Vidal puis dans le cadre de la résistance antinazie participait à des actions menées par le contre-espionnage français gaulliste - groupe du commandant Naura Papa Noël - tout en restant en étroit contact avec Ponzan.
Dans la nuit du 11 au 12 avril 1941, il quittait l’Andorre et gagnait à pieds Barcelone puis Madrid où il établissait divers contacts et montait un réseau ainsi qu’à Saragosse où il était en contact avec le compagnon Joaquin Sin Oto. C’est peut être à ce moment (ou lors d’un autre voyage ?) qu’il avait remis aux compagnons de Huesca la somme de 8.000 pesetas. Il revenait en France le 18 décembre 1941 avec Ausencio Montañés Lopez. C’est au cours de ce voyage qu’avaient été arrêtés en Espagne Saturnino Carod Lerin El Cuco et Vicente Moriones Belzunegui José Luis Marquez Boya. Dans un rapport adressé à Ponzan, V. Castan accusait Eliseo Melis d’être le responsable de ces détentions.
En avril 1942 il effectuait un nouvau voyage en Espagne et réorganisait le groupe de Madrid, organisait un point d’appui à Pampelune et établissait le contact avec le nouveau Comité régional d’Aragon. V. Castan revenait en France début juin.
Par deux fois il échappa à la Gestapo et fut à l’origine de la capture d’un très impotant agent allemand ce qui lui valut à la libération la croix de guerre avec étoile de bronze.
A la Libération, il refusa toute offre du gouvernement provisoire de la République et même sa prime de démobilisation. Conforme à ses idéaux il retourna à l’anonymat et à sa condition de peintre en bâtiment.
Lors du premier congrès tenu à Paris en mai 1945 par le mouvement libertaire espagnol en exil avait été nommée une commission chargée d’enquêter sur les activités de certains camarades pendant la seconde guerre mondiale (résistance, collaboration avec les services secrets alliés) et la gestion des biens de l’organisation. Dans une entrevue avec cette commission le 16 août 1945, Victorio Castan expliquait ainsi ses activités dans les services de renseignement : “ J’avais été expulsé à deux reprises de France, et comme je me trouvais dans une situation difficile, les français m’ont proposé de travailler pour eux sur les activités des allemands en Espagne, et j’ai accepté. Une fois arrivé en Espagne, je suis allé voir le Comité national de l’organisation à Madrid et lui ai exposé ma situation et les avantages que l’on pourrait en tirer. J’ai toujours pensé que l’organisation ne pouvait pas se compromettre dans ces services… mais que dans ces circonstances, certains compagnons volontaires devaient se sacrifier et par leur action aider l’organisation… Le premier compagnon qui a informé le mouvement en Espagne des activités du Conseil général [du mouvement libertaire] en France, c’est moi. Je leur ai proposé de désigner un délégué pour aller en France où il pourrait vérifier directement l’exactitude de la situation. Ce délégué qui devait venir en France, c’était Torres, qui passa par la maison de Melis, et quand j’ai appris que Melis connaissait ce projet, je renonçais à lui faire franchir la frontière. Melis avait proposé à Ponzan des attentats contre Franco. Lorsque Moriones avait été arrêté, Melis avait proposé aux jeunes du groupe d’aller à Vilaljuga (Gerona), mais, les jeunes, méfiants, avaient envoyé en avant-garde un discret délégué qui contata qu’il y avait à Vilaljuga beaucoup de gardes, ce qui était inhabituel dans la zone, et les jeunes s’abstinrent d’y aller”.
Puis, pour éviter toute confusion, et fidèle à son opinion que les actions individuelles ne devaient pas compromettre l’organisation, Victorio Castan cessait de militer à la CNT.
Victorio Castán Guillen s’est suicidé en mai 1983 à Bayonne quelques jours après la mort de son épouse Pilar.