Daniel Agadia Fernandez, membre des Jeunesses Libertaires (FIJL) avait exercé un commandement dans l’armée républicaine pendant la guerre. Il était entré en France le 21 août 1939. En 1945 il travaillait comme aide cuisinier à la base américaine d’Orléans où il habitait au 275 rue de Bourgogne. Il participait à plusieurs missions organiques en Espagne.
Arrêté à Madrid en juin 1948, il fut condamné à vingt cinq ans de détention et passa de longues années au pénitencier du Dueso (Santander) où il travailla notamment à l’atelier de menuiserie et où, le 31 mai 1952 il reçut la visite de 2 envoyées de la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC), une française et une norvégienne, qui l’interrogèrent ainsi que 3 autres prisonniers sur les raisons et les conditions de leurs détentions. Cet entretien fut l’objet d’un rapport établi par le Comité intérieur de la CNT de la prison du Dueso transmis au secrétariat intercontinental de la CNT en exil pour être remis à Mme Ingrand de la Commission internationale de la CICRC qui était en train de mener une enquête sur les prison en Espagne en vue de la rédaction d’un Livre blanc. A la date du 10 mai 1952, le comité intérieur estimait le nombre de prisonniers du Dueso à 1101, répartis ainsi : droits communs, 448 ; prisonniers de guerre, 117 ; politiques et sociaux d’après guerre, 536.
De son coté Daniel Agadia avait adressé une lettre (datée du 2 juin 1952) adressée à ces deux visiteuses et précisant notamment : “… D’abord je dois vous apprendre qu’en sortant du bureau où nous étions, le fonctionnaire du Ministère qui vous accompagnait, m’a fait rentrer dans un petit bureau à coté pour me demander très gentiment (“d’espagnol à espagnol”) si je voulais être assez aimable de le renseigner au sujet de notre entrevue. Naturellement j’ai éludé la question…
Je regrette d’avoir oublié de vous dire qu’il y a aussi des prisonniers qui sont des militaires professionnels membres de la FARE ; mais ceux-ci sont peu nombreux. Plus deux qui sont des nationalistes basques… Il y a pas mal de prisonniers antifascistes qualifiés dans leur procès de communistes, mais en fait 50% de qualifiés tels, sont en fait des républicains, des socialistes, des anarchistes que le régime franquiste est trop intéressé à faire passer pour communistes… je vais vous signaler deux cas : Benjamin Fernadez Fernadez…, vieux socialiste, maquisard pendant 10 ans dans les Asturies, qualifié de communiste. Malgré plusieurs démarches auprès des autorités pour être enregistré comme socialiste, il n’a pas réussi du tout. Moi-même, malgré ma répulsion pour tous les régimes autoritaires, à un moment ils m’ont désigné comme communiste. J’ai protesté énergiquement ; heureusement j’ai eu du succès….
Je profite de l’occasion pour vous signaler le cas de trois de mes camarades arrêtés en 1933 pour délits politiques ; ils ont été amnistiés par le Congrès des députés en 1936. Franco les a de nouveau arrêtés et ils sont toujours en prison et depuis quelques années dans cette colonie du Dueso. Il s’agit de Manuel Garrido Paez, Vicente Cervero et Rafael Castro… Tous les renseignements que mes camarades vous fournissent, et ce que je vous ai donné directement, vous êtes autorisées… à les montrer publiquement, car ils répondent à la plus stricte vérité. D’ailleurs je suis enfermé pour avoir lutté contre la tyrannie de franco, donc ce ne sera pas moi qui reculerait devant aucune situation pour dénoncer les crimes du national-syndicalisme contre notre peuple écrasé par leur tyran..”
Á sa libération Daniel Agadia resta en Espagne et s’installa à Gijon où il épousa Covadonga Quiros.
Après la mort de Franco, il fut à Gijon le correspondant et distributeur du périodique Tierra y libertad (Mexico). Dans les années 1980 il a été délégué de la CNT de tendance rénovée dans plusieurs congrès.
Daniel Agadia Fernandez est mort à Gijon le 8 janvier 1990.