Bandeau
Los de la sierra 1936-1975
Dictionnaire des guerilleros et résistants antifranquistes

Le dictionnaire des guérilleros et résistants antifranquistes, tente de répertorier les hommes et femmes de toutes tendances (anarchistes, communistes, socialistes, sans parti) ayant participé pendant près de quarante ans, (1936-1975) souvent au prix de leurs vies ou de longues années de prison et souvent dans une indifférence générale, à la lutte contre la dictature franquiste. Ce travail a été commencé il y a plus de vingt ans par l’historien libertaire Antonio Tellez Sola (1921-2005) en collaboration avec Rolf Dupuy du [*Centre International de Recherches sur l’Anarchisme*] (CIRA).

RODRIGUEZ GARCÍA, Melchor « EL ANGEL ROJO » ; « Manuel AMADOR »
Né à Séville en 1893 - mort le 14 février 1972 - ouvrier tôlier, chaudronnier, ébéniste, représentant de commerce - FAI – CNT – Séville (Andalousie) & Madrid (Nouvelle-Castille)
Article mis en ligne le 16 octobre 2012
dernière modification le 10 novembre 2023

par R.D.
Melchior Rodriguez Garcia

Après avoir abandonné ses prétentions à devenir un toréador célèbre et avoir toréer à Sanlucar (1915), Madrid (1918 où il avait été blessé), Salamanque, El Viso et Séville, Melchor Rodríguez García, orphelin de père à l’âge de 10 ans, commença à travailler très tôt dans des ateliers de chaudronnerie de Séville. Il s’initia au mouvement libertaire au contact de Manuel Pérez à qui il succédera à la tête du syndicat et de Paulino Díez et adhéra à la fin des années 1910 à la CNT (section automobiles de la branche du bois) à Séville.

Emigré à Madrid, vers 1920 pour échapper à la répression – il avait été détenu quelques jours lors d’une grève - il fut d’abord semble-t-il adhérent à l’UGT (le syndicat majoritaire de la région Centre), la CNT étant interdite, mais forma le groupe anarchiste Los Libertosavec Celedonio Perez Bernardo,Franciso Trigo, José Barrios, Guerra, Manuel López et Feliciano Benito, groupe qui avait ses activités à l’Ateneo de Divulgacion Social.

En 1927 il fut l’un des premiers adhérents de la Fédération Anarchiste Ibérique (FAI) à Madrid. Très actif dans la période qui a précédé la guerre civile, ce qui lui vaudra d’être emprisonné à plusieurs reprises, il a été membre du Comité Révolutionnaire Républicain qui avait été envoyé à Jaca le 11 décembre 1930 pour y convaincre en vain Fermin Galán de repousser sa tentative de soulèvement. En octobre 1933 il participa au grand meeting à Gijon (Asturies) en faveur de l’amnistie, et en juillet avait présidé celui de Madrid. En novembre 1934 il avait fait partie avec Cecilio Rodríguez de la délégation qui s’était entretenue avec Martinez Barrio pour obtenir la libération de deux cents militants de la CNT.

Melchor Rodríguez García se montra très actif lors de la grande grève du bâtiment au printemps 1936 à Madrid en tant que secrétaire du comité national pro-presos (militants emprisonnés) en faveur desquels il organisa de nombreuses réunions et la solidarité.

Pendant toute cette période il collabora à un grand nombre de titres de la presse libertaire dont CNT, La Tierra, Solidaridad Obrera, Campo Libre, Castilla Libre, Crisol, etc.

Lors du coup d’État franquiste de juillet 1936, il participa le 23 juillet, avec Celedonio Pérez, Luis Pérez et d’autres membres du groupe Los Libertosà la réqusition du palais du Marquis de Viana, Teobaldo Saavedra, à Madrid où il permettra à de nombreuses personnes de droite (curés, militaires, patrons, etc) de se réfugier et auxquels il fournira des saufs conduits leur permettant de sauver leurs vies. Il fut ensuite appelé au Ministère de la Justice de Juan García Oliver, et nommé directeur des prisons le 5 novembre 1936 poste qu’il occupera jusqu’en mars 1937. Pacifiste et humaniste fervent, il tentera de réformer le système pénitentiaire et sauvera même la vie de près de 1600 prisonniers fascistes, s’opposant aux excarcélations et exécutions sauvages. Le 6 décembre 1936, il s’oposa notamment à la foule venue pour se venger d’un bombardement franquiste sur Alcala de Henares et préserva la vie des 1500 prisonniers franquistes qui y étaient enfermés. Il y gagnera le surnom de Angel Rojomais sera l’objet d’une campagne de calomnies de la part des staliniens l’accusant de faire partie « de la cinquième colonne ».

En 1937 c’est lui qui révéla et dénonça la prison clandestine établie par le PCE rue Hernandez de la Hoz. Il fut ensuite nommé conseiller des cimetières de Madrid comme représentant de la FAI, poste où il aida de nombreuses familles à enterrer dignement leurs défunts.

En mars 1939, après avoir échappé de peu à une exécution par les communistes lors des afrontements avec la junte de Segismundo Casado, il fut chargé par le Comité national du mouvement libertaire d’aller en France pour coordonner l’aide aux réfugiés espagnols, mais il refusa et décida de rester en Espagne. Il fut nommé maire adloint de Madrid et fut mandaté par le colonel Casado et Julian Besteiro de négocier la reddition de Madrid avec les franquistes (28 mars 1939).

Fait prisonnier à la fin de la guerre il a été condamné à mort mais les nombreuses interventions en sa faveur d’anciens prisonniers franquistes, entraîneront la commutation de sa peine en celle de 20 ans de prison. Dont il effectuera 5 ans à Puerto de Santa Maria avant d’être remis en liberté provisoire en 1944.

Dès lors, après avoir refusé un poste qui lui avait été offert dans le syndicat franquiste, il allait participer activement à la clandestinité dans la région centre ce qui lui vaudra près de 34 arrestations. Il sera l’un des plus solides soutient au Comité National d’Enrique Marco Nadal. Il a été condamné le 14 avril 1948 à un an de prison pour avoir introduit des documents et de la propagande de la CNT à la prison d’Alcala de Hénarès. Libéré en août 1948 il continua de militer jusqu’à la fin des années 1960. En juillet 1965 il s’opposa à la manoeuvre "cincopuntista" (accords avec les syndicats verticaux de certains membres de la CNT).

Mechor Rodríguez García, qui aimait à dire « On peut mourir pour des idées, mais jamais tuer », est mort à Madrid le 14 février 1972.

Après la mort de Franco et le retour de la démocratie, il avait été l’objet de plusieurs hommages et une rue de Seville porte son nom.